Couper ces fils abîmés.
Ils sont en train de sombrer, il faut les sauver!
Ou du moins, protéger ce qu'il en reste...
Cette masse filasse me tracasse.
Je veux me couper les cheveux!
Quelle longueur vais-je supprimer?
«That is the question»
On ne dirait pas comme ça, mais mes pointes sont niquées.
Le genre à casser à la moindre occasion.
Ca ne peut plus durer, les pauvres!
J'ai pitié de ces pauvres ficelles abîmées...
Rassurez-vous, je ne suivrai en aucun cas l'exemple de Brit'...
Envie d'un poème. Parce que Baudelaire je l'aime!
Et laissons-nous porter par d'autres plumes... Rimbaud et Verlaine. (bientôt!)
A celle qui est trop gaie
Ta tête, ton geste, ton air
Sont beaux comme un beau paysage ;
Le rire joue en ton visage
Comme un vent frais dans un ciel clair.
Le passant chagrin que tu frôles
Est ébloui par la santé
Qui jaillit comme une clarté
De tes bras et de tes épaules.
Les retentissantes couleurs
Dont tu parsèmes tes toilettes
Jettent dans l'esprit des poètes
L'image d'un ballet de fleurs.
Ces robes folles sont l'emblème
De ton esprit bariolé ;
Folle dont je suis affolé,
Je te hais autant que je t'aime !
Quelquefois dans un beau jardin
Où je traînais mon atonie,
J'ai senti, comme une ironie,
Le soleil déchirer mon sein ;
Et le printemps et la verdure
Ont tant humilié mon coeur,
Que j'ai puni sur une fleur
L'insolence de la Nature.
Ainsi je voudrais, une nuit,
Quand l'heure des voluptés sonne,
Vers les trésors de ta personne,
Comme un lâche, ramper sans bruit,
Pour châtier ta chair joyeuse,
Pour meurtrir ton sein pardonné,
Et faire à ton flanc étonné
Une blessure large et creuse,
Et, vertigineuse douceur !
A travers ces lèvres nouvelles,
Plus éclatantes et plus belles,
T'infuser mon venin, ma soeur !
Charles Baudelaire
Bohémiens en Voyage
La tribu prophétique aux prunelles ardentes
Hier s'est mise en route, emportant ses petits
Sur son dos, ou livrant à leurs fiers appétits
Le trésor toujours prêt des mamelles pendantes.
Les hommes vont à pied sous leurs armes luisantes
Le long des chariots où les leurs sont blottis,
Promenant sur le ciel des yeux appesantis
Par le morne regret des chimères absentes.
Du fond de son réduit sablonneux le grillon,
Les regardant passer, redouble sa chanson ;
Cybèle, qui les aime, augmente ses verdures,
Fait couler le rocher et fleurir le désert
Devant ces voyageurs, pour lesquels est ouvert
L'empire familier des ténèbres futures.
Et le contenu intégral des Fleurs du Mal, si chères à mon coeur.
(Qui donc sur Terre pourrait ne pas aimer Baudelaire de toute façon, hein?)
Aube
J'ai embrassé l'aube d'été.
Rien ne bougeait encore au front des palais. L'eau était morte. Les camps d'ombres ne quittaient pas la route du bois. J'ai marché, réveillant les haleines vives et tièdes, et les pierreries regardèrent, et les ailes se levèrent sans bruit.
La première entreprise fut, dans le sentier déjà empli de frais et blêmes éclats, une fleur qui me dit son nom.
Je ris au wasserfall blond qui s'échevela à travers les sapins : à la cime argentée je reconnus la déesse.
Alors, je levai un à un les voiles. Dans l'allée, en agitant les bras. Par la plaine, où je l'ai dénoncée au coq. A la grand'ville elle fuyait parmi les clochers et les dômes, et courant comme un mendiant sur les quais de marbre, je la chassais.
En haut de la route, près d'un bois de lauriers, je l'ai entourée avec ses voiles amassés, et j'ai senti un peu son immense corps. L'aube et l'enfant tombèrent au bas du bois.
Au réveil il était midi.
Arthur Rimbaud
Quelle déception!
Mettre son réveil à sonner pour 05:30, ne dormir que trois heures, payer mon billet de train allé-retour pour une ville dont j'ignore et où je ne connais personne, rester assise pendant plus de deux heures, sentir mon coeur battre fort sous ma poitrine, les mains et les jambes tremblantes, le stress, cette question qui se cogne à l'intérieur de ma tête : «As-t-il bien eu mon message? Sera-t-il là?»
Je suis arrivée à destination. Je descends du train, marche sur le quai, mes yeux regardent partout autour de moi, aux aguêts de la moindre personne en mouvement ou immobile. «Est-il là?» Je ne le vois pas. Je fais un petit tour de la gare, je cherche les toilettes, il ne sera sans doute pas là avant 10:30, c'est l'heure que je lui avais donnée sur le message. J'aurais préféré le lui dire de vive voix afin d'être sûre qu'il n'oublie pas. Jene trouve pas les toilettes. Mince. Il est 10:28, je vais m'assoir en attendant qu'il arrive. Il ne devrait plus tarder maintenant. Je suis assise et le temps passe comme il le fait toujours. Je suis assise et j'attends. Il va bientôt arriver.
Je surveille l'entrée de la gare. Quelque chose cloche. Quelque chose cloche et cette impression grandit en certitude au fur et à mesure que les minutes passent. Il ne viendra pas. Il n'a pas eu mon message ou peut-être a-t-il oublié...
J'essaie de le joindre sur son portable.
Répondeur.
Encore.
Quelle déception!
Je vais dehors, peut-être va-t-il arriver d'ici quelques minutes. Il pleut. Je vais marcher aux alentours de la gare et je vais me trouver un truc à manger. Il pleut. Je vais encore tremper mon jean. Bah! Qu'importe. J'aperçois une galerie, j'entre, au moins serai-je au sec. Je me balade rapidement, mais un type louche m'accoste.
Allons bon.
«Bonjour mademoiselle!
- Bonjour...
- Une petite pièce pour ceux qui sont dans la misère?»
Il me tend un journal en contre-partie.
«Je suis désolée, mais je dois garder mon argent pour pouvoir manger ce midi.
- Ah bon, c'est pas grave. Comment tu t'appelles?
- Janie.
- C'est joli, Tu es très jolie. Tu as quel âge?
- Dix-sept ans.
- Ca te dirait un café?
- Non merci, je dois y aller, quelqu'un m'attend.»
Je n'ai pas totalement menti pour une fois. J'ai à peine quatres euros pour mon déjeuner, mais personne ne m'attend. Et je n'aime pas le café. Je n'ai surtout aucune confiance en ce gars bizarre. 'Manquerait plus qu'il m'arrive une connerie! Ce serait la cerise sur le gâteau.
Quelle déception!
Je repars en direction de la gare. Je reste debout à côté de l'entrée. Je regarde les voitures passer, les gens marcher, se presser, la pluie tomber.
Quel tableau!
Une vieille dame sort de la gare avec sa valise et son parapluie qu'elle déploit. Mais il ,'est pas d'excellente qualité, il s'ouvre assez mal. Son parapluie est assorti à son manteau, un rouge fushia délavé et usé. Mamie, vas-tu réussir à ouvrir ce parapluie? Ah, oui. Il faudrait en acheter un autre... Bah, il fera encore l'affaire quelque temps.
Je rentre à l'intérieur de la gare, j'ai froid aux pieds. De toute façon, il ne viendra sûrement pas, autant aller m'assoir en attendant que le temps s'écoule, comme il le fait toujours.
Je vais manger et essayer une dernière fois de l'appeler et si je tombe encore une fois sur son répondeur, j'abandonne et je lirai le livre que j'ai amené.
J'ai pressé deux fois la touche verte de mon portable ; une fois pour ouvrir la liste des appels et une seconde fois pour appeler le dernier numéro composé.
...
«Bon jour, vous êtes bien sur le portable d'Al...»
Tut.
J'ai raccroché.
Encore ce fouty répondeur.
Il est maintenant midi pile. Il me reste deux heures et demi à attendre assise sur ce banc. Mais à l'intérieur comme à l'extérieur j'ai froid aux pieds. la différence, c'est qu'à l'intérieur je suis au sec et je ne peux pas me perdre.
Si j'avais su...
Je ne suis pas en colère.
Je pourrais. Je devrais peut-être l'être d'ailleurs. Mais ce n'est pas le cas. Je suis juste très déçue.
Je lève les yeux. Les gens passent. Ils arrivent ou bien partent. Avec valise ou bien sans. Avec quelqu'un ou bien tout seul. Certains se retrouvent dasn cette gare. D'autres partent ensemble. D'autre encore s'en vont rejoindre quelqu'un. Et moi?
Le néant. L'ambiance est si grise, si humide, si morne.
Quoi qu'il en soit, c'est une journée de perdue et aussi de l'argent foutu en l'air. Je n'aime pas perdre mon temps, gaspiller mon temps, ni mon argent.
Je suis un peu énervée contre lui tout de même. Pas qu'un peu. Je le traite de "con" dans ma tête. C'est stupide et ça ne change rien, je ne peux même pas dire que ça me soulage non plus. Je crois que j'ai rarement été aussi déçue. Dépitée. C'est bête, j'avais pourtant de l'estime pour l ui...
Mais qu'est-ce que je suis en train de dire? J'exagère.
Quelle déception.
Quel dommage aussi.
Je vais peut-être réessayer de l'appeler tout à l'heure. Mais à quoi bon? Mieux vaut ne pas s'attendre à un miracle. A ce niveau-là, j'en viens à considérer toute alternative comme miraculeuse. Je suis bête quand même.
Mes yeux continuent de se tourner vers l'entrée de la gare... Mais rien. Toujours rien. Plus que deux heures à attendre. Patience.
Et dire que c'était lui qui m'avait fait cette proposition... Je trouvais ça vraiment gentil en plus. De jolies paroles... Des paroles en l'air? Et l'air est pollué.
C'est décevant, tellement décevant que c'en est écoeurant.
DÉPITEE.
Ah! Un appel. Je ne connais pas le numéro, alors je ne décroche pas. Pas envie. La sonnerie se tait, puis un coup de vibreur : un message. J'ai un message sur mon répondeur. Je compose machinalement le 888 et écoute.
C'est lui.
Merde.
Il a des soucis avec son portable.
Je rappelle ce numéro comme il me le demande sur le message. Je n'y croyais plus.
«Je suis désolé, j'arrive dans dix minutes.»
A peine dix minutes plus tard, je regarde pour la ennième fois dans la direction de l'entrée, je crois voir une silhouette connue, pour ce que j'avais pu en apercevoir par rapport aux diverses photos.
«Salut, je suis vraiment désolé, t'as attendu longtemps?
- Je suis arrivée à 10:30.
- Ah, putain, merde. Je suis désolé.
- C'est pas grave.»
Il est venu me chercher, avec deux heures de retard, certes, mais il n'avait pas oublié. Il me présente son ami, David, qu'il appelle "Dave" (accent à l'anglaise). Il m'emmènent au RU car ils n'ont pas mangé.
A l'université, nous rejoignons deux autres personnes : Romain et Manue. Partis pour le RU, changement d'avis, direction "le meilleur kebab de Tours". Ils parlent. Ils plaisantent. Ils rient. Je souris. Nous retournons à l'université, Alexis me fait faire un tour rapide de l'établissement. C'est à si perdre. Allez comprendre l'architecture de ce truc, moi je n'ai pas réussi... Nous ressortons, en direction du vieux Tours. Les maisons en colombage et tout ça. Sur le chemin, nous croisons deux autres amis d'Alexis (il dit bonjour pour la quinzième fois au moins, c'est une "rockstar"...) : Laura et Florent. C'est chez Florent que squatte Alexis, on va dire une pseudo colocation, puisqu'il ne paie pas de loyer... Nous partons pour l'appartement. Une fois là-bas, c'est la consternation.
Ce n'est pas un appartement. C'est véritable cafarnaëum! Je n'ai jamais vu pareil bordel ! A peine s'il est possible de voir la couleur du lino. Et la question : Mais où puis-je m'assoir??
Chanel faisait des siennes, le jeu de cache-cache dans l'écharpe de Laura, les chatouilles sous le gilet. Vive les rats. C'est si mignon!
Et ils parlent, ils rient, ils plaisantent, fait des blagues de "faux racisme" (j'en connais d'autres qui jouent à ce jeu-là... Une pensée pour mes chers en tendres Burtoniens DT), je ris et je souris.
J'ai passé un bon après-midi avec ces gens. C'est drôle, à eux tous on pourrait faire une palette de peinture tant ils sont tous différents, tous colorés.
Je me suis tout d'abord sentie stressée, puis désemparée, comme un guerrier désarmé et jeté dans la fosse aux lions. Et ce soir je suis contente, heureuse de mon après-midi, sans regret.
Ah! bien sûr le temps s'améliore une fois que je suis sur la voie du retour!
Foutu temps.
J'irai très volontier à Tours à la rentrée prochaine, cet ednroit me plaît.
Cependant, est-ce que je supporterai le latin?
Telle est la question cruciale.